Les Hyksôs
Aurélie Paulet

Au cours de la deuxième période intermédiaire (vers 1800-1550 avant notre ère), l’Egypte fut, au moins en partie, gouvernée par des souverains étrangers connus dans les sources grecques sous le nom de Hyksôs et dans les documents égyptiens sous le nom de Heqaou-khasout (« souverains des pays étrangers »).

L’origine de ces Hyksôs a fait couler beaucoup d’encre. Autrefois, une origine hourrite a parfois été envisagée mais cette hypothèse est définitivement écartée aujourd’hui, les auteurs préférant désormais situer le berceau des Hyksôs au Levant. Ces auteurs se fondent notamment sur l’étude de l’onomastique.
Les circonstances de l’arrivée en Egypte et de l’accession au pouvoir de ces Asiatiques sont difficiles à déterminer. Si les fouilles menées à Avaris, la capitale des Hyksôs, dans le Delta oriental, ont révélé que des Cananéens étaient installés sur ce site depuis le Moyen Empire et ont aussi mis en évidence une forte croissance de population d’origine asiatique vers la fin de la treizième dynastie et le début de l’époque hyksôs, il n’est cependant pas possible de déterminer si les premiers souverains Hyksôs étaient issus de la population installée dans le Delta depuis le Moyen Empire ou bien s’ils faisaient partie des nouveaux venus.
Ces « souverains des pays étrangers » constituent la quinzième dynastie, dont l’étendue du pouvoir semble s’être limitée au Delta oriental, comme le suggère l’étude de la céramique, même s’il est possible qu’ils soient à un moment parvenus jusqu’à Thèbes. D’après Manéthon, un prêtre de l’époque ptolémaïque qui a écrit, en grec, une histoire de l’Egypte, cette quinzième dynastie comprenait six souverains : Salitis, Bnon, Apakhnas, Apophis, Iannas et Assis. Le papyrus de Turin, datant du règne de Ramsès II, répertorie, lui aussi, six Hyksôs, mais seul le nom du dernier d’entre eux est conservé : Khamoudi. Par ailleurs, nous possédons une inscription d’un roi Seker-Her provenant d’Avaris, ainsi que plusieurs objets aux noms de Khayan et d’Apophis. Il est possible, au vu de la ressemblance entre les deux noms, que le Khayan des inscriptions égyptiennes soit la même personne que le Apakhnas de Manéthon. Ces divers documents permettent de reconstruire avec quelque vraisemblance la fin de la quinzième dynastie : Khayan - Apophis - Khamoudi, Seker-Her étant probablement un des prédécesseurs de Khayan. Le début de la dynastie reste pour sa part problématique et différents noms, attestés sur des scarabées, ont été proposés par les égyptologues.
A l’époque où le Delta était aux mains des Hyksôs, la région de Thèbes était, elle, gouvernée par une dynastie locale, la dix-septième dynastie, dont les souverains tentaient d’agir dans la continuité des rois du Moyen Empire et de la treizième dynastie. Ce sont ces souverains thébains de la dix-septième dynastie qui vont expulser les Hyksôs d’Egypte.

Le dernier roi de cette dynastie, Kamose, va en effet partir en guerre contre Apophis, comme nous l’apprennent deux stèles qui relatent ses exploits. La guerre contre les Hyksôs se poursuit sous Ahmose, le successeur de Kamose. Nous possédons sur cette guerre le témoignage d’un soldat qui a participé aux campagnes du roi : Ahmose, fils d’Abana. Ses prouesses sont racontées dans sa tombe, à El-Kab, dans un texte où il parle de la prise d’Avaris puis du siège de Sharouhen, une ville au Sud de Gaza où s’étaient probablement réfugiés les Hyksôs. La prise d’Avaris, vers 1550, marque la fin de la domination Hyksôs en Egypte et le début du Nouvel Empire : Ahmose est le premier roi de la dix-huitième dynastie.
voir également notre étude : Les Hyksôs dans la litérature égyptienne
Légendes des images :
- Montant de porte au nom du roi hyksos Seker-Her.
Traduction: Celui des Deux Maîtresses "Celui qui lie les Arcs", l'Horus d'Or "Celui qui établit la frontière", le souverain des pays étrangers (Seker-Her) - Stèle de Kamose, Musée de Louxor, découverte à Karnak en 1954.
Au début de la 20è ligne, on lit les signes du yod-roseau et de l'homme assis (lecture i), puis deux signes identiques du tabouret (lecture p), encore le yod-roseau (lecture i), et enfin le déterminatif de l'ennemi entravé = IPEPI/ Apophis.
A la fin de la 2è ligne, est mentionné le toponyme Hout Ouaret, le Château de la Jambe, accompagné du déterminatif des trois collines qui désignent les pays étrangers. Hout Ouaret a été grécisé en Avaris, le nom de la capitale du Delta. - Scarabée au nom de Aaouserrê Apophis, stéatite glaçurée sertie dans l'or, ht 1,45 cm. Provenance inconnue, époque hyksos. Louvre, E 3282.
Le cartouche royal est au centre de deux figures symétriques (faucon surmonté d'un uraeus). Cet ensemble couronne le motif de l'Union des Deux Terres, appelé Semataouy.
Orientation bibliographique :
- BIETAK, M., Avaris the capital of the Hyksos. Recent Excavations at Tell el-Dab‘a, Londres, 1996.
- OREN, E. D. (éditeur), The Hyksos : New Historical and Archaeological Perspectives, Philadelphie, 1997.
- RYHOLT, K.S.B., The Political Situation in Egypt during the Second Intermediate Period c.1800-1550 B.C., Copenhague, 1997.